Depuis le mois de mai, la ville de Cluny en Saône-et-Loire expérimente de nouveaux véhicules plus respectueux de l’environnement. Parmi eux, le cyclospace, une voiture à pédales équipée de panneaux solaires et que son inventeur, Nicolas Trüb, présente comme un outil pour favoriser le lien social. Comment ? Il l’explique à Koikispass depuis sa maison de Monceaux-le-Comte aux portes du Morvan dans la Nièvre.
Comment est né le principe du cyclospace ?
Nicolas Trüb : Quand j’étais adolescent, je bricolais déjà des kartings à moteur, avant de devenir ingénieur puis designer de petits objets pour
la maison avec la seule prétention de proposer des choses pratiques et fabriquées en France que je vends dans ma boutique, La Boutique du futur,
à Montrouge (Hauts-de-Seine) ainsi qu’en ligne sur laboutiquedufutur.com. Au début des années 2000, j’ai découvert les travaux de Georges Mochet qui, entre 1930 et 1950, a inventé et produit plusieurs milliers de quadricyles, c’est-à-dire des voitures à pédales. Je suis tombé sous le charme du caractère poétique de cette histoire et je me suis lancé le défi d’en construire un moi-même. C’est en 2008 que naît le premier cyclospace avec deux places en ligne et un toit pour affronter les intempéries. Ayant rencontré un petit succès d’estime, une médaille au concours Lépine, j’en ai fabriqué de nouveaux pour des demandes de location ou d’achat. Depuis, j’en ai produit une vingtaine. A chaque fois les modèles diffèrent. Certains demandent davantage de places, des panneaux solaires, une batterie, un coffre… On peut aussi y attacher une carriole
et des barres de toit.
Depuis mai, le cyclospace fait l’objet d’une expérimentation à Cluny en Saône-et-Loire. En quoi consiste-t-elle ?
J’ai rencontré l’Ademe, une agence gouvernementale dont l’objectif est de promouvoir des projets à vertu écologique. Nous sommes une trentaine de bricoleurs ou de petits entrepreneurs à travailler sur des véhicules intermédiaires innovants avec chacun des approches différentes. Pour le compte de l’Ademe, nous réalisons des démonstrations et dialoguons avec les collectivités locales, comme la communauté de communes de Cluny. Tout le monde peut y essayer le cyclospace, qui peut aussi être prêt lors d’événements.
Quelle est votre ambition ?
Cette expérimentation permet à l’Ademe de réfléchir aux usages de ce type de véhicules. De mon côté, je souhaite populariser le concept mais aussi montrer qu’il est possible de changer le rapport au temps et aux autres. Les performances de ce type de véhicule – qui va quand même à 25 km/h !- ne sont pas déterminantes. Ce qui est important à mes yeux est plutôt l’impact sur le vivre-ensemble.
Comment un véhicule peut-il agir
sur nos relations ?
Notre société nous pousse sans cesse à la performance, à la vitesse, au toujours plus de confort… alors qu’au fond, ce que l’on recherche, c’est la rencontre. Je suis actuellement très préoccupé par l’isolement dans les campagnes et la perte des lieux de rencontres. A bord d’un cyclospace, l’échange naît forcément avec les gens que l’on croise. Pour moi, le cyclospace est un outil de cohésion sociale et d’unification de la société ! J’ai bien conscience que c’est un brin prétentieux… Mais mon engagement profond, c’est de rendre la vie moins ennuyeuse. Si seulement on pouvait moins se prendre au sérieux et modérer nos appétits de vitesse… En soi, le cyclospace est presque un art de vivre !
Virginie Jannière
Infos pratiques : plus d’infos sur lafabriquedesmobilites.fr ou sur laboutiquedufutur.com